La lithothérapie est une science. Elle est tout sauf un nom hasardeux né d’une pratique obscure. Mélange de croyances et d’alchimie pour les uns, remède miracle pour les autres, la lithothérapie tire son nom des mots grecs « lithos » (pierre) et « therapeia » (cure). Autrement dit, le soin par les pierres.
Dénommer cette spécialité sur des racines grecques ne repose pas sur un malheureux effet de mode. C’est au contraire la conséquence d’une connaissance pointue des origines même de la lithothérapie. Car, si ce nom est apparu dans le courant du XXème siècle, la pratique de cette médecine lui est bien antérieure.
Survivant à toutes les révolutions culturelles, présente sur toute la planète, la médecine par les pierres a parcouru les siècles, des Romains à l’Angleterre victorienne en passant par les Arabes de l’Andalousie. Retour sur une science qu’il nous faut apprendre à la bougie de l’histoire.
La lithothérapie : une science oubliée
Bien des croyances passées sont tombées dans l’oubli. De la dent de loup portée en amulette pour assurer une bonne dentition, aux premières dents des chevaux, utilisées pour favoriser la venue des dents de lait des nouveau-nés [1], seule la lithothérapie a traversé les âges. Parce qu’elle est plus qu’une croyance ou qu’une simple superstition, la lithothérapie s’impose à nouveau comme une autre forme de médecine.
L’utilisation des pierres n’est pourtant pas nouvelle. Aujourd’hui plus encore qu’hier, les pierres sont les indispensables éléments de notre développement. Du quartz de nos montres et de nos ordinateurs, aux rubis des premières pièces d’horlogerie [2], les pierres sont le ressort de notre qualité de vie.
Au-delà de leur fonction purement mécanique que nous leur avons longtemps préférée, les Anciens trouvaient déjà en elles des énergies apaisantes, réparatrices. La lithothérapie est une médecine douce, qui n’est certes jamais tout à fait tombée dans l’oubli, mais dont les Modernes n’ont jamais pris toute la mesure. Il nous faut donc sonder l’histoire de la lithothérapie pour réapprendre de ceux qui nous ont précédés.
Les Lapidaires : livres oubliés de nos Pères
Nous convenons tous que les plantes soignent. Pour ce qui est des pierres, certains doutent. Peut-être parce que les scientifiques du Moyen-âge ont écrit leurs traités se rapportant aux pouvoirs des pierres séparément de leurs traités démontrant le pouvoir des plantes. Les historiens leur ont alors apporté une attention moindre, car ils ne trouvaient pas dans ces écrits les fondements de nos sciences contemporaines. C’est ce que défend l’historien John Marion Riddle, de l’université américaine de Caroline du Nord, qui rapporte même que les pierres étaient pourtant plus utilisées que les herbes dans la médecine ancienne [3].
Plus intéressant encore, les lapidaires rédigés au Moyen-âge, reprennent fidèlement les assertions présentes dans les lapidaires écrits en Grèce, en Italie ou encore au Moyen-Orient durant l’Antiquité [4]. Les sceptiques diront que ces lapidaires, qui nous sont parvenus des Grecs Théophraste, Dioscoride, mais aussi des Latins Pline, Marbode ou encore des Arabes Ibn Beithar et El Birouni, ne sont pas plus sérieux que les récits d’Homère. Pourtant, ce n’est pas ce qu’en disent nos érudits qui les considèrent comme « scientifiques, au sens réel que nous attachons à ce mot, c’est-à-dire de véritables traités de minéralogie »[4].
Les médecins arabes, qui furent à la base de tant d’avancées médicales, puisèrent abondamment leurs savoirs chez les auteurs grecs. Au point que l’ensemble des connaissances scientifiques permettant aujourd’hui de parler de lithothérapie nous proviennent des Héllènes.
L’Antiquité grecque, berceau de la lithothérapie
Le lapidaire d’Aristote est de ceux-là. Apparu comme les autres lapidaires antiques au temps de l’école d’Alexandrie, c’est-à-dire entre le IIème siècle avant Jésus-Christ et le IIIème siècle de notre ère, il traite des vertus médicales des pierres. Au point de soulever des arguments scientifiques avec la même acuité que nous les retrouvons chez les chercheurs du XIXème siècle [5], notamment en ce qui concerne l’érosion ou encore la formation des aérolithes[6].
C’est ce traité d’Aristote qui a infusé une grande partie des lapidaires suivants, jusqu’aux digressions des alchimistes, qui puisaient dans ces réflexions sur la géologie les principes de leurs recherches et irriguer ainsi un autre pan de la lithothérapie.
Toutefois, de quels effets parlons-nous ? Pour les Grecs, les pierres avaient la propriété d’agir sur les humeurs, qu’ils comptaient au nombre de quatre [7] :
- le phlegme,
- le sang,
- la bile noire,
- la bile jaune.
Les pierres permettaient de rétablir un équilibre physiologique, à côté de l’usage des herbes. Pour connaître l’activité des éléments sur le corps, les Anciens utilisaient ce qui s’appelle la théorie des signatures. Cette théorie part du postulat que l’apparence extérieure d’une pierre possède une signature révélant l’œuvre de Dieu, tant de par sa forme que de par sa couleur ou encore de son odeur[8]. A partir de là, pouvaient-ils définir son rôle.
Du rôle des pierres pour les Hommes de l’Antiquité à nos jours
Cure de jouvence ou élixir d’immortalité ? Quels rôles précis attribuaient les anciens aux pierres et aux gemmes ? Les Assyriens plaçaient dans le lapis-lazuli la qualité de protéger leur porteur des maladies provoquées par la « main du fantôme », main qu’ils attribuaient aux ancêtres décédés. Les symptômes de ces maladies étaient des douleurs intenses dans des parties du corps[9].
De nos jours, certaines émeraudes portées en pendentifs, bracelets ou autres bagues, sont réputées pour lutter contre les crises d’épilepsie [10]. Se pose ainsi la question du motif réel du port de pierres précieuses. Est-ce pour rehausser la beauté de celui ou celle qui les porte ou est-ce pour leur assurer la santé en équilibrant leurs humeurs ?
Certaines pierres particulièrement rares, comme la pierre d’hirondelle, se portaient ainsi durant trois jours attachés au bras gauche comme traitement contre le lunatisme ou encore la dépression [11]. La pierre d’hirondelle est une pierre que l’on trouve dans l’estomac des hirondelles. Ces oiseaux l’ingéreraient pour faciliter leur digestion [12]. Les hirondelles ont-elles alors le pouvoir d’activer les pierres ? C’est en tout cas ce que croyaient nos ancêtres, et pas seulement les Occidentaux. En Inde, on chargea ainsi négativement un diamant, avec des conséquences désastreuses.
La malédiction du Hope
Le docteur Werklé [13] rapporte qu’en 1668, en Inde, un Français se risqua à dérober un diamant bleu dans un temple de la ville de Rama. Il ne savait pas que les prêtres et le Grand Mogol avaient frappé la gemme d’un rituel conférant un esprit et une emprunte négative à la pierre. De retour en France, il vendit le diamant qui entra dans les parures de Madame de Montespan. Celle-ci sombrera dans la disgrâce avec l’affaire des poisons, perdra tous ses titres et mourra dans sa retraite.
Le diamant fut ensuite la propriété de Louis XVI et Marie-Antoinette, que la Révolution emporta à l’échafaud. Il passa dans les mains d’un bijoutier hollandais qui se le fit voler par son fils qui le vendit à un sultan turc. Ce dernier fut détrôné. Le diamant finira dans les valises d’un homme qui sombrera dans l’Atlantique avec le Titanic. Ainsi, un diamant chargé négativement emmena à la ruine toute la série des Hommes avides qui s’en étaient fait propriétaires.
C’est bien pour cela qu’il convient de savoir comment charger positivement ses pierres, afin de tirer tous les effets bénéfiques possibles de la lithothérapie. C’est ce que nous vous enseignons dans notre article consacré aux vertus de la Labradorite.
[1] Bulletin de la société archéologique du département d’Ille-et-Vilaine, tome XVI, première partie, imprimerie de Charles Cartel et Cie, Rennes, 1883, p.116.
[2] Puissance, effets bénéfiques des pierres et minéraux, docteur Gilbert Werklé, éditions blanc p.15
[3] Lithotherapy in the Middle Ages… Lapidaries Considered as Medical Texts, John Riddle, p.38.
[4] Revue de philologie, de littérature et d’histoire anciennes, tome 27, librairie Klincksieck, Paris, 1893.
[5] Revue des études grecques, tome VI, janvier-mars 1894, Le lapidaire d’Aristote, F. de Mély, Ernest Lecroux éditeur, Paris, p. 182.
[6] ibid, p.189
[7] Revue des études grecques, 118-1, 2005, La théorie des quatre humeurs et des quatre tempéraments dans la tradition latine (Vindicien, pseudo-Soranos) et une source grecque retrouvée,
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